“Arrivée en Israël deux mois avant la rentrée scolaire, je n’ai pas grand-chose à faire sinon à emménager mon ashkoubit et tenter de prendre mes marques. Pour les non-initiés, une ashkoubit, c’est une maison en préfabriqué, genre maison de vacances plutôt cheap, que l’on m’a attribuée en tant que olé ‘hadash.
Extrait de EN ISRAËL ! CHRONIQUE D'UNE NOUVELLE IMMIGRANTE (2002). En vente sur Amazon (60 pages, 4,99 €)
Je rejoins ainsi le cortège de Russes, de Français et d’Américains qui sont arrivés comme moi en quittant beaucoup de choses. Comme j’ai un peu perdu les réflexes de mes ancêtres nomades, j’étais quelque peu chargée, et je me suis épuisée pendant plusieurs jours à tenter de faire entrer mes 33 m3 de meubles, livres, bibelots, tableaux, gadgets domotiques et autres luges et Moon boots dans ce 80 m². Inutiles, sauf à reconstituer un cocon protecteur qui me permet de conserver quelques repères et de me souvenir de ce que je suis.
Ma parcelle de terrain est au centre du yishouv, même racine que yoshev, yeshiva… Je n’ai donc pas à craindre d’éventuelles incursions nocturnes de visiteurs et voisins arabes mal intentionnés. La schizophrénie est complète lorsque l’on se retrouve à faire des longueurs dans la piscine semi-olympique ombragée de palmiers qui, je le précise pour les esprits chagrins, est alimentée par un forage dans une rivière souterraine.
Mais même en n’ayant rien d’autre à faire qu’à installer ma maison, engager les premières démarches administratives – et je découvrirai qu’elles sont nombreuses ! – et à me libérer progressivement du stress de ces derniers mois en France, je constate que le temps file à une vitesse hallucinante. Il est comme un élastique tendu. Il ne se comporte pas comme là d’où je viens. Il joue sa partie différemment d’en Europe.
C’est sans doute la première leçon que j’ai apprise ici. À peine le temps de se retourner c’est de nouveau Shabbat. Une invention bien nécessaire qui devait être créée pour cette terre d’urgence.
Une année pour l’oulpan, les cours d’hébreu intensifs, l’intégration et la réinvention professionnelle. Une année exceptionnelle sûrement.
Après, s’il est permis de faire des plans sur l’avenir, j’irai sans doute m’installer ailleurs, vers une ville, peut-être vers la côte. Je ne sais pas. Ou autre part”. Mercredi 20 novembre 2002
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